Définition et fonctionnement du marché concurrentiel




La notion de « marché pertinent » ou « marché de référence » est un concept important du droit de la concurrence. En particulier, elle permet de déterminer s’il y a ou non une position dominante. La notion de marché a une dimension géographique et une composante matérielle. La composante matérielle est fondée sur la notion de substituabilité de produits ou de services. Le marché pertinent est le lieu où se rencontrent l'offre et la demande de produits et de services. Ces produits et ces services sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux. La substituabilité est établie lorsque l'on peut raisonnablement penser que les demandeurs ou les utilisateurs considèrent les biens ou les services comme des moyens alternatifs qu’ils peuvent utiliser pour satisfaire une même demande. Des prestations de services distinctes appartiennent au même marché à partir du moment où le comportement réel des utilisateurs et des offreurs les rendent indivisibles. En cas de litige, le juge peut ordonner une expertise pour examiner les choix effectués par les acheteurs et les utilisateurs et déterminer s'ils substituent les produits ou les services en cause.

En cas de litige sur l’application des règles de la concurrence (ententes, abus de position dominante, concentrations), il faut tout d’abord déterminer le marché en cause. Le marché en cause se définit au cas par cas. L’objectif est de déterminer s'il existe des concurrents réels qui sont capables de peser sur le comportement de l'entreprise en cause et de relever le degré de concurrence effectif sur le marché. Le marché en cause réunit le marché de produits et le marché géographique. Un marché de produits en cause comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de l'usage auquel ils sont destinés. La notion de marché géographique sert à délimiter l’aire à l’intérieur de laquelle la victime peut se tourner vers d’autres fournisseurs. Deux critères permettent de délimiter le marché géographique. Il s’agit de l’homogénéité des conditions de concurrence et la fonctionnalité du marché. S’agissant de l’homogénéité, il peut exister des différences dans les conditions de concurrence à l’intérieur du marché géographique mais elles ne doivent pas entraver l’accès à certaines parties de ce marché à des entreprises qui opèrent dans d’autres parties du marché. Autrement dit, l’acheteur doit pouvoir, quelque soit sa localisation dans un marché géographique donné, se procurer des produits auprès de fournisseurs établis ailleurs dans ce marché. S’agissant de la fonctionnalité, il faut déterminer pour chaque cas concret quel est le marché géographique en cause.

Il existe de très nombreux critères qui permettent de délimiter le marché géographique en cause. Tout d’abord, le prix. C’est le principal critère. En effet, l’existence de prix différents selon les États membres indique qu’il s’agit de marchés nationaux séparés. Ensuite, on trouve les parts de marché. Il y a aussi des facteurs qui sont liés aux consommateurs. Il s’agit des habitudes, de la préférence des consommateurs pour leurs produits nationaux, la mode, les traditions,… Des facteurs sont liés à la nature du produit. Les produits de conservation difficile ont un territoire de vente réduit et donc un marché géographique étroit. Le principal facteur lié à la nature du produit est le coût de transport. En effet, plus un produit est difficile à transporter, plus l’incidence des frais de transport limite l’aire géographique dans laquelle le fabricant peut le vendre de manière profitable. Enfin, le dernier critère est celui des obstacles tarifaires. L’existence des droits d’entrée ou de taxes à l’importation élevées, des restrictions à l’importation ou encore des normes relatives à la qualité, à la composition ou à la santé limitent l’étendue du marché géographique. En effet, ces obstacles rendent plus difficile l’accès à des producteurs étrangers. Les facteurs qui sont liés à l’organisation de ou des entreprise concernées (par exemple, la commercialisation de produits à partir d’un centre unique facilite la distribution de ces produits).

C’est la Commission européenne qui analyse le marché en cause au cas par cas. Dans un premier temps, elle vérifie si les produits en cause appartiennent ou non au même marché de produits. Elle étudie aussi les répartitions des parts de marché détenues par les parties en cause et par leurs concurrents, les prix et les écarts de prix pratiqués. Une fois le marché de produits et le marché géographique délimités, la Commission recherche si le marché en cause est concurrentiel. Pour assurer une concurrence efficace, les entreprises ont l’obligation de respecter deux grandes contraintes : la substituabilité au niveau de la demande (les clients) et de l'offre (les fournisseurs). Un marché est concurrentiel si le client a la possibilité de choisir entre une gamme plus ou moins vaste de produits qui ont des caractéristiques similaires et si le fournisseur ne rencontre pas d'entraves à la fourniture de produits ou de services sur un marché donné. S’agissant de la demande, la Commission observe si à la suite d’une variation légère mais constante du prix courant (de 5 à 10 %), les clients du produit en cause ont la possibilité d'accéder de façon immédiate et efficace à un produit similaire. S’agissant de l’offre, la Commission vérifie si d'autres fournisseurs ont la possibilité de réorienter de façon immédiate et efficace leur production et leur commercialisation sur le marché en cause.

La Commission vérifie quelles sont les conditions d'accès sur le marché défini. Elle fait alors une appréciation de la dimension du produit et de la dimension géographique du marché en cause. Elle prend en compte plusieurs éléments : le passé récent (c’est-à-dire des variations des prix récentes) ; les résultats d'études spécifiques (tests statistiques, étude des facteurs qui ont une influence sur les préférences du marché local comme la culture, la langue,…) ; le point de vue des clients et des concurrents ; les préférences des consommateurs (études de marché, parallèle entre les habitudes d'achat des clients sur le marché en cause avec celles d'autres clients sur un marché géographique distinct) ; les barrières et les coûts associés à un transfert de la demande vers d'autres produits ou d'autres zones ; les différentes catégories de clients et les prix discriminatoires.

La définition du marché en cause permet de savoir quels sont les opérateurs (fournisseurs, clients, consommateurs) du marché. On calcule alors pour chacun des fournisseurs, la taille totale du marché et les parts de marché détenues. La base retenue est le chiffre d'affaires qui correspond aux produits en cause et qui sont vendus sur le territoire en cause. La taille totale du marché et les parts de marché détenues par chacun des opérateurs se calculent à partir des estimations des entreprises, des études commandées à des sociétés de conseil ou à des associations professionnelles ou encore à partir des chiffres d'affaires des entreprises concernées.

La demande d'un produit sur un marché est la quantité de ce produit qui est susceptible d'être achetée par les consommateurs à un prix donné. On peut distinguer trois attitudes dans la fixation des prix en fonction de la concurrence. Premièrement, les entreprises fixent leur prix au niveau du prix moyen du marché. Elles s'alignent sur le prix pratiqué par leurs concurrents qui dominent pour éviter une « guerre » des prix. Cette méthode est utilisée lorsque les coûts sont mal connus, lorsque la rentabilité procurée par le prix moyen du marché est insuffisante, ou lorsque l'entreprise est en position faible (c’est-à-dire, une forte concurrence ou un oligopole). Deuxièmement, les entreprises qui sont en position de force sur le marché décident d'un prix inférieur ou supérieur à celui du marché. Elles choisissent un prix bas pour augmenter leur part de marché ou elles maintiennent un prix élevé pour augmenter leur profit. Troisièmement, les entreprises peuvent choisir un prix plus élevé que la moyenne quand elles pensent que le consommateur acceptera de payer ce prix pour un produit ou une entreprise auxquels il est fidèle. C’est le cas pour les produits de luxe.

L'élasticité de la demande par rapport au prix est un indicateur qui mesure la sensibilité de la demande par rapport aux variations de prix. Autrement dit, on mesure la réaction des consommateurs par rapport aux variations de prix. Dans la majorité des cas, plus les prix augmentent, plus la demande diminue et inversement. Cette variation est mesurée par le coefficient d'élasticité. Le coefficient d'élasticité est influencé par la nature et les spécificités du produit, par l'image de marque du produit, par les services qui accompagnent le produit,… Des différences d'élasticité de la demande entre les marchés peuvent entraîner des différences de prix. Sur un marché qui est caractérisé par une demande « élastique », le prix de base doit être bas si l'entreprise veut atteindre un volume de ventes satisfaisant. En revanche, sur un marché où la demande est « inélastique », le prix peut être fixé à un niveau élevé sans qu’il entraîne pour autant une baisse importante de la demande (sauf si les prix des concurrents sont inférieurs).

L'acheteur peut demander des modulations sur le prix qui est proposé par le vendeur. Les prix pratiqués par le vendeur sont répertoriés dans un barème de base. Les modulations du prix de base sont regroupées au sein d'un barème d'écarts. Les variations de prix tiennent compte de plusieurs critères : la distance ; les réductions accordées ; les prestations connexes (SAV, crédit, livraison,…) ; les prix promotionnels et les révisions de prix.

Rechercher parmi les articles juridiques