Les sanctions applicables au détournement de gage ou d'objets saisis




Il s’agit ici moins de protéger la propriété d’autrui que de protéger les droits des créanciers. En cela l’infraction se distingue de l’abus de confiance qui, quant à elle protège non pas le créancier, mais le propriétaire ou le possesseur d’un bien. Si un débiteur, propriétaire de la chose remise en gage, détourne le bien gagé, il se rend coupable, non pas d’abus de confiance, mais de détournement d’objet constitué en gage.

Le détournement d’objet constitué en gage :

Il s’agit du fait, par un débiteur, un emprunteur ou un tiers donneur de gage, de détruire ou de détourner l’objet constitué en gage. L’incrimination s’applique à tout gage, qu’il s’agisse d’un gage avec dépossession ou sans dépossession, d’un gage civil ou commercial, d’un gage conventionnel ou d’un gage légal (par exemple, le nantissement d’un fonds de commerce ou le gage de véhicules automobiles destinés à protéger le vendeur ou l’organisme de crédit). L’infraction est constituée lorsque le débiteur détruit matériellement le bien qu’il a donné en gage ou lorsqu’il le détourne. En présence d’un gage avec dépossession, le détournement se caractérisera le plus souvent par le fait de s’emparer du bien remis en garanti pour l’affecter à d’autres fins. En présence d’un gage sans dépossession, les formes du détournement sont plus variées : il peut s’agir d’un refus ou d’un retard non justifié dans la restitution au créancier du bien constitué en gage ou plus généralement de tout acte qui tend à rendre impossible la mise en œuvre du gage, par exemple la revente de la chose gagée ou l’abandon sur la voie publique du véhicule gagé.

Le détournement de gage est un délit intentionnel qui consiste à agir en ayant connaissance de l’existence du gage et en ayant la volonté, ou au moins la conscience, d’entraver la réalisation du gage et donc de porter atteinte aux droits du créancier. Les juges apprécient souverainement l’existence de l’intention coupable et ils font souvent preuve de sévérité. Le détournement de gage est un délit instantané qui se consomme au moment du détournement. Le paiement de la dette postérieure au détournement du gage est donc un simple repentir actif qui ne fait pas disparaître l’infraction.

Le détournement d’objet saisi :

Il s’agit du fait, par le saisi, de détruire ou de détourner un objet saisi entre ses mains en garantie des droits d’un créancier et confié à sa garde ou à celle d’un tiers. Il s’agit donc ici de protéger les droits du créancier saisissant en garantissant l’indisponibilité des biens saisis. L’incrimination s’applique aux différentes voies d’exécution ayant pour effet de placer certains biens sous mains de justice et de les rendre indisponibles : saisie-exécution, saisie conservatoire, saisie-attribution, saisie-vente et même saisie immobilière.

L’élément matériel consiste à détruire ou détourner le bien saisi, c’est-à-dire à réaliser un acte portant atteinte aux droits des créanciers en paralysant l’exercice de la saisie et de ses suites. Par exemple, consomme l’infraction le fait de vendre à un tiers les objets saisis, le fait de déplacer les objets saisis ou encore le fait de refuser de représenter les biens saisis sur demande du créancier.

L’infraction est un délit intentionnel qui suppose la connaissance par le prévenu de la mesure qui frappe les objets saisis et sa conscience que la destruction ou le détournement réalisé porte atteinte aux droits du créancier saisissant. Ici encore, le droit pénal se contente des apparences puisque le saisi ne peut invoquer la nullité de la saisie pour justifier son acte : il ne peut se faire justice à lui-même ; en ce cas, la seule voie possible est de solliciter l’annulation et la mainlevée judiciaire de la saisie.

La répression du détournement de gage ou d’objet saisi :

Les deux infractions sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende, la tentative étant incriminée. Le coupable encourt également des peines complémentaires, soit la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit et l’affichage ou la diffusion de la décision de condamnation.

Quant aux personnes morales, elles encourent, outre la peine d’amende dans les conditions prévues par la loi, les peines complémentaires de confiscation de la chose et d’affichage ou diffusion de la décision.

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