Le paiement du passif lors d'une liquidation judiciaire




La procédure de liquidation judiciaire confie au liquidateur judiciaire le soin de payer les dettes de l’entreprise. Il répartit le produit de la vente des biens. C’est lui qui règle l’ordre entre les créanciers, sous réserve des contestations qui pourraient être portées devant le tribunal de grande instance. Sont réglés en premier lieu, sans avoir à subir le concours d’aucun autre créancier : premièrement le créancier qui peut compenser sa créance avec une dette qu’il a envers l’entreprise ; deuxièmement, le créancier qui peut utiliser un droit de rétention ou de revendication (au titre d’une clause de réserve de propriété par exemple). En effet, il est fréquent que des entrepreneurs détiennent des biens qui ne leur appartiennent pas. La clause de réserve de propriété est une clause contractuelle qui assure au vendeur le paiement du prix de la marchandise. Le vendeur reste propriétaire des biens tant que l’acheteur n’a pas payé intégralement le prix. Quant au droit de rétention, c’est la possibilité accordée à un créancier (le rétenteur) qui détient un objet mobilier de son débiteur de lui en refuser la restitution s’il ne paie pas l’intégralité de ses créances. Le droit de rétention est donné notamment à l’hôtelier ou au garagiste. Et enfin, le créancier bailleur. Le privilège du bailleur est un privilège spécial portant sur les meubles (mobiliers, matériel et marchandises) qui garnissent les lieux loués.

L’ordre des créances est le suivant :
• les créances des salaires ;
• les frais de justice antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective ;
• les créances antérieures garanties par des sûretés immobilières ou par des sûretés mobilières spéciales assorties d''un droit de détention, ou par un nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement ;
• les créances postérieures éligibles au traitement préférentiel (c'est à dire nées régulièrement après le jugement d''ouverture de la procédure de liquidation judiciaire) ;
• les créances postérieures non éligibles au traitement préférentiel et les créances chirographaires.

Ainsi, les créances des clients - par exemple si un bien a été commandé et payé et qu’il n’est jamais livré - ont un niveau de priorité bas en cas de liquidation judiciaire : ce sont les créanciers chirographaires. En pratique, leurs chances d’être remboursés ou livrés sont donc très limitées.

Les principales sûretés sont l’hypothèque, le gage et le nantissement. Le créancier hypothécaire est celui qui bénéficie d'un droit d'hypothèque sur un immeuble, ce qui lui garantit le remboursement de sa dette sur le produit de la vente de l'immeuble hypothéqué prioritairement par rapport aux autres créanciers. Le gage est un contrat par lequel un débiteur remet à son créancier un objet mobilier pour assurer l'exécution de ses engagements, par exemple, le remboursement d'un prêt d’argent. Le contrat se forme par la remise de l'objet sur lequel porte le gage. Le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet un bien incorporel à son créancier pour garantir sa dette. L’ordre des créanciers ne peut souvent être connu de manière définitive qu’après plusieurs mois, voire plusieurs années. En effet, la vérification des créances peut durer un certain temps. C’est pourquoi la loi autorise le juge-commissaire à ordonner le paiement à titre provisionnel d’une quote-part de la créance.

Le juge de l’exécution est chargé de la procédure de distribution. Aussi, c’est lui qui devra trancher les éventuelles contestations relatives à la validité des déclarations de créance. La procédure d'ordre est la procédure au cours de laquelle les créanciers d'un même débiteur dont les biens vendus aux enchères publiques se sont révélés d'une valeur insuffisante pour couvrir la totalité du passif, font reconnaître le rang de leur créance. Lorsque les créanciers d'un même débiteur ont obtenu un jugement qui ordonne la vente publique des biens de leur débiteur mais que le prix est insuffisant pour couvrir l'ensemble de leurs créances, ils peuvent se réunir pour assister à la distribution du produit de cette vente. C’est ce que l’on appelle la « collocation ». La loi détermine le rang de chaque créancier pour déterminer l'ordre dans lequel, compte tenu de la qualité de sa créance, il participera à la distribution. Certains créanciers peuvent ne pas participer à la distribution si le rang de leur créance ne le leur permet pas. Les autres créanciers sont payés selon le rang de leur créance.

Le montant du produit d'une vente judiciaire se répartit entre les créanciers en proportion de leurs créances respectives. Lorsque le résultat de la vente ne permet pas le paiement de tous les créanciers, on calcule quel est le pourcentage qui existe entre le montant global des créances et le montant total à distribuer. Chacun des créanciers reçoit donc de la part du liquidateur un pourcentage du montant de sa créance. C’est ce qu’on appelle la distribution au « marc le franc ». Chaque créancier reçoit un dividende. Le dividende est la partie du produit d'une vente qui revient à chacun des créanciers lorsque par suite d'insuffisance d'actif ils n'ont pas pu obtenir d'être intégralement payés des sommes qui leur étaient dues. La décision de distribution des dividendes constitue un acte juridique unilatéral et non un contrat de vente. Par conséquent, la remise d'un immeuble en paiement du dividende dû à une société n'opère pas transmission de propriété du bien immobilier à titre onéreux. Ce bien n’est donc pas imposable.

La loi considère qu'en raison de la qualité de leurs créances (aliments, salaires, impôts) il n’est pas équitable que certaines personnes subissent la concurrence des autres créanciers et qu'elles se trouvent contraintes à ne recevoir qu'une partie de ce qui leur est dû. C’est pourquoi, la loi établit des priorités. C’est ce qu’on appelle les « créances privilégiées ». Les créanciers qui ne disposent pas d'un privilège sont les créanciers chirographaires. Ils se partagent les sommes qui restent après que les créanciers privilégiés aient été payés. Les créances privilégiées sont classées entre elles suivant le rang du privilège dont elles bénéficient. Les créances chirographaires sont toutes de rang égal. Si l’immeuble sur lequel porte un privilège (gage, hypothèque par exemple) n’a pas encore été vendu mais qu’une distribution des sommes a déjà eu lieu, les créanciers privilégiés se partagent ces sommes en fonction de leurs créances respectives. Après la vente de l’immeuble, ils ne récupèrent que la somme qui leur est encore due pour payer l’intégralité de leur créance (et non pas la totalité du prix de l’immeuble). Le reste profite aux créanciers chirographaires.

Les titulaires de créances qui naissent après le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire bénéficient d’un traitement de faveur par rapport aux créanciers antérieurs. On parle de « traitement préférentiel ». Les créances admises au traitement préférentiel doivent remplir deux conditions. Dans un premier temps, elles doivent être nées régulièrement après le jugement d’ouverture de la liquidation ; ce qui signifie que les pouvoirs du débiteur, de l’administrateur ou du liquidateur doivent avoir été respectés. Par exemple, les créances nées d’actes conclus directement par le débiteur alors qu’il devait se faire assister par le liquidateur dans les actes de gestion de l’entreprise ne sont pas considérées comme régulières. Dans un second temps, les créances doivent être utiles ou liées à la poursuite de l’activité de l’entreprise. Les droits des créanciers antérieurs au jugement d’ouverture sont gelés par la suspension des poursuites individuelles. Autrement dit, un créancier antérieur ne peut plus entamer de procédure pour obtenir la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent. Il doit alors déclaré sa créance au passif. En revanche, il pourra poursuivre ces actions contre les tiers. C’est le cas pour les cautions, les codébiteurs et le conjoint du débiteur.

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