Qu'est ce que le renvoi préjudiciel ?




Il peut arriver qu’à l’occasion d’un litige devant une juridiction nationale l’application d’une règle de droit communautaire soulève des questions. Il est alors possible d’interroger la Cour de justice des Communautés européennes. C’est ce qu’on appel le renvoi préjudiciel. La procédure permet la coopération entre le juge national et le juge communautaire. Elle assure une interprétation et une application uniforme du droit dans l'ensemble de l'Union européenne. Le renvoi au juge communautaire est obligatoire pour les juridictions de dernier ressort ; il est facultatif pour les autres juridictions. La juridiction nationale qui choisit le renvoi préjudiciel doit surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice rende sa décision. Il doit s’agir d’un litige principal. La Cour de justice doit répondre à la question soulevée. Mais, elle peut s'y opposer si la question n’est pas de sa compétence. C’est une procédure entre juges. Les parties au litige principal peuvent présenter des observations. Le greffier de la Cour doit communiquer la demande de question préjudicielle aux Etats membres, à la Commission et au Conseil s’il est l’auteur de l’acte litigieux. Ils peuvent présenter des observations dans un délai de deux mois.

Il existe deux types de recours préjudiciels : le recours préjudiciel en interprétation et le recours préjudiciel en appréciation de validité.
• Le recours préjudiciel en interprétation permet au juge national de demander à la Cour de justice des éclaircissements sur le sens des dispositions de la règle communautaire. La question peut concerner n’importe quelle disposition du droit communautaire. Il n’est pas nécessaire que la règle soit directement applicable.
• Le recours préjudiciel en appréciation de validité permet au juge national d’interroger la Cour de justice sur la validité d’une disposition du droit communautaire. C’est une appréciation de la légalité de la norme. La question ne peut concerner que les actes des institutions communautaires.
Elle ne peut pas porter sur les traités constitutifs et les actes assimilés. Le renvoi est facultatif pour les recours en interprétation. Il est obligatoire pour les recours en appréciation de validité. Pour l’interprétation ou l’appréciation de validité des dispositions sur la libre circulation des personnes, l’asile et l’immigration, la Cour de justice peut être saisie par les juridictions qui statuent en dernier ressort, le Conseil, la Commission et les Etats membres. La Cour de justice qui est saisie d’une question d’interprétation peut soulever d’office une question de validité. La théorie de « l'acte clair » prévoit que le juge national ne doit renvoyer la question que s'il y a une difficulté réelle d'interprétation du droit communautaire. Elle a beaucoup été utilisée par le Conseil d’Etat.

L’arrêt en interprétation a une portée générale. Il a l’autorité de la chose jugée. Le juge national devra donc trancher le litige en prenant en compte l’interprétation qui a été donnée. Ce sera le cas aussi pour toutes les juridictions nationales qui auront à statuer sur la même question. Cependant, les juridictions nationales pourront saisir à nouveau la Cour de justice de la même question si elles jugent que l’arrêt ne les éclaire pas suffisamment ; si elles estiment qu’il y a des faits et des éléments de droit nouveaux ; ou si elles souhaitent provoquer une évolution de la jurisprudence. En cas de constatation d’invalidité, le juge national ne doit pas appliquer l’acte communautaire, ni les actes nationaux qui l’appliquent. La constatation d’invalidité s’impose à toutes les juridictions nationales qui sont confrontées à l’application de l’acte invalidé. Si l’acte n’a pas été déclaré invalide, la question de validité pourra être à nouveau posée devant la Cour de justice mais dans le cadre d’une autre procédure et avec des moyens nouveaux. L’interprétation et la déclaration d’invalidité ont un effet rétroactif (effet ex tunc). Mais, dans un souci de sécurité juridique et pour éviter de remettre en cause des relations établies de bonne foi, la Cour de justice peut limiter dans le temps la portée de l’arrêt (effet ex nunc).

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