Les limites à l'exercice du droit de propriété




Le droit de propriété peut être limité dans deux hypothèses, lorsqu'il est question de la protection de l’intérêt général ou de l’intérêt particulier. S'agissant de la protection de l’intérêt général, la loi prévoit que nul ne peut être contraint à céder sa propriété si ce n’est pour cause d’utilité publique. L’Etat peut ainsi décider de s’attribuer la propriété d’un bien dans certains cas précis. On parlera alors d’expropriation pour cause d’utilité publique. L’Administration qui contraint alors le particulier à céder son immeuble ou son terrain doit préalablement lui accorder une juste indemnité. Le juge judiciaire peut être saisi lorsque la procédure d’expropriation n’est pas respectée ou lorsqu’il existe une atteinte grave et manifeste au droit de propriété.

Pour ce qui est de la protection de l’intérêt privé, le droit de propriété lorsqu’il est utilisé de manière abusive peut également faire l’objet de limitations. Ainsi, un propriétaire qui use abusivement de son droit pourra être sanctionné par le juge et contraint d’indemniser la victime de son abus. Il faudra pour cela apporter la preuve d’une faute du propriétaire, de son intention de nuire. Représente par exemple un abus de droit le cas du propriétaire d’un terrain qui, gêné par les dirigeables du terrain voisin, décide d’installer de très haut pics.

Le seul fait d’user de son droit de propriété, indépendamment de toute intention de nuire, peut parfois constituer un trouble anormal de voisinage. C’est le caractère anormal du trouble qui sera prit en compte (ex. bruit excessif). Tout ce qui dépasse les inconvénients normaux de voisinage est sanctionné. L’acte qui cause le trouble doit être suffisamment important, inhabituel et répétitif pour que l’auteur soit tenu d’y mettre fin ou de le réparer. Lorsqu’il s’agit d’un trouble de voisinage sans faute, on parle souvent dans ce cas de responsabilité objective, l’usager qui a occasionné le trouble à son voisin devra lui payer une compensation, il appartiendra toutefois à la victime du trouble d’apporter la preuve que la gêne est bien occasionnée par un acte du propriétaire voisin.

Les servitudes. Une servitude constitue une charge imposée à un fond (le fond servant), pour l’usage et l’utilité d’un autre fond (le fond dominant) qui appartient à une autre personne. Nous sommes donc en présence d’une servitude lorsque deux fonds (pas nécessairement contigus) appartenant à des propriétaires différents sont touchés l’un par une charge, l’autre par un avantage. Il y a donc 2 caractéristiques essentielles : une charge qui procure un avantage, s’il n’y a pas d’avantage il n’y pas de servitude. Cette servitude doit être destinée à permettre l’usage d’un autre fond. Si elle ne sert en rien l’usage d’un autre fond ce n’est pas une servitude.

Les servitudes sont attachées au fond et non à la personne, par conséquent, un changement de propriétaire n’est pas de nature à changer les servitudes grevant le terrain. Elles sont mentionnées dans les titres de propriété. Les servitudes peuvent être de natures légales, c’est la loi qui les prévoit (ex. le passage de lignes électriques) ; ou elles peuvent être conventionnelles, c’est-à-dire qu’elles résultent d’un accord entre les parties (ex. un droit de passage). Ainsi, il est possible d’opérer une classification des différentes servitudes en fonction de leur origine :

Les servitudes imposées par la loi ou servitudes légales : elles sont applicables de plein droit entre les propriétaires, l’écrit n’est pas nécessaire. Il peut s’agir de servitudes d’utilité publique, qui font l’objet d’une énumération, on y retrouve : les servitudes relatives à la conservation du patrimoine naturel (forêts, eaux, réserves naturelles etc.), du patrimoine culturel (monuments historiques, monuments naturels et patrimoine architectural etc.) et du patrimoine sportif. Les servitudes relatives à l'utilisation de certaines ressources et équipements : énergies, canalisations, réseau routier etc. Les servitudes relatives à la Défense Nationale. Et les servitudes relatives à la salubrité et à la sécurité publiques.

L'Etat impose également des règles générales d'urbanisme appelées servitudes d'urbanisme en raison du fait qu'elles limitent les prérogatives des propriétaires immobiliers quant à la gestion de leurs biens, on parle alors souvent de droits négatifs. Ainsi, dans de nombreux documents d'urbanisme on retrouve ces limites dans des domaines aussi variés que l'affectation des sols, la surface minimum des terrains, la taille des constructions, la hauteur ou l'aspect extérieur des constructions: toitures, clôtures etc.

Les servitudes imposées par la loi peuvent également être des servitudes d’utilité privée, parmi les plus utilisées on retrouve le droit d’accès à la voie publique. La loi prévoit qu’un propriétaire qui n’a sur la voie publique aucun accès ou une issue insuffisante peut demander à son voisin un passage suffisant pour accéder à sa propriété. Le propriétaire du fond servant, pour lequel la servitude de passage représente une contrainte, pourra demander une indemnité proportionnelle à la gêne qui lui est causée. Toutefois, il n’y a pas lieu à indemnité lorsque le propriétaire de la parcelle enclavée peut justifier de l’usage habituel de cette servitude depuis au moins 30 ans. Dans le cas où il y aurait désaccord entre les voisins, le Tribunal de Grande Instance du lieu de situation des propriétés peut être saisi afin de trancher le différend.

Les servitudes peuvent également avoir pour origine un fait de l’homme : il s’agit de servitudes établies par des usages ou par convention entre les propriétaires des fonds (ex. un droit de passage). Enfin, les servitudes peuvent découler de la situation naturelle des lieux (ex. servitude d’écoulement des eaux). Dans tous les cas une servitude ne saurait en aucun cas constituer une véritable dépossession qui aboutirait à priver le propriétaire du fond servant de toute prérogative sur son terrain et qui viderait le droit de propriété de sa substance.

D’autres mesures peuvent intervenir pour limiter les droits d’un propriétaire sur son terrain. La règle de droit commun en matière de droit de chasse consiste à prévoir qu’aucune personne n’a la faculté de chasser sur la propriété d’autrui sans le consentement du propriétaire ou de ses ayants droit. Il appartient au propriétaire du bien de décider si le bien peut être chassé (c’est le droit de chasse) et quelles sont les personnes autorisées à le faire (c’est le droit de chasser). La seule exception concerne les sociétés communales de chasse qui pour leur part sont autorisées à exercer leur droit de chasser sur les terrains privés et ce même contre la volonté des propriétaires, sauf si le terrain est clos ou que la propriété fait plus de 20 hectares.

De même, lorsque des plantations ou des arbres gênent les propriétés voisines, il peut être fait obligation au propriétaire de les couper. La première règle imposée au propriétaire étant que toute plantation doit être faite à une distance minimale de 2 mètres de la ligne séparant les propriétés. Si malgré cela des branches dépassent les limites de propriétés, le voisin peut exiger du propriétaire qu’il les coupe. C’est une forme de responsabilité négative qui est ici retenue, en ce sens que le propriétaire à laisse faire, il a laissé un troubler se créer, il doit donc réparer la conséquence de ses omissions.

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